CARDINALES n°1

CARDINALES n°1

L'inéluctable baisse des retraites

http://www.challenges.fr/economie/20130118.CHA5323/les-retraites-francais-n-echapperont-pas-a-une-baisse-de-leurs-pensions-notamment-agirc-et-arrco.html

 

Créé le 18-01-2013 à 18h15- Mis à jour le 20-01-2013 à 09h44
Fanny Guinochet
 
 

Pour éviter la faillite du système, le gouvernement doit choisir entre allonger la durée de cotisations, faire payer davantage les actifs ou geler les pensions. Et la 3ème option est la moins mauvaise à ses yeux.

François Hollande et Jean-Marc Ayrault lors de la cérémonie des voeux. (GUIBBAUD-POOL/SIPA)

François Hollande et Jean-Marc Ayrault lors de la cérémonie des voeux. (GUIBBAUD-POOL/SIPA)

 

Avec la crise, notre système de retraite est au bord de la faillite C’est un sujet épineux pour le gouvernement et sa majorité mais, elle aura du mal à l’esquiver. Jeudi 17 janvier, lors de ses vœux au monde de l’entreprise et aux organisations paritaires, François Hollande a d’ailleurs reconnu que, la réforme de 2010, n’avait pas tout réglé. Le président de la République a admis que l’allongement de la durée de cotisation pour bénéficier d’un taux plein de 41 ans en 2012 et à 41,75 ans en 2020, est insuffisante pour maintenir l'équilibre du système de financement.

Fin décembre, le Conseil d’orientation des retraites, le Cor, avait déjà agité le chiffon rouge en publiant des prévisions alarmistes : l’organisme table sur un déficit prévisionnel de 21 milliards dès 2017.

Côté retraites complémentaires, ce n’est guère mieux : le déficit cumulé des deux régimes, Agirc (pour les cadres) et Arrco ( pour tous les salariés), s’élève à 6,5 milliards d’euros. Il passera à 10,5 milliards dès 2017. Surtout, si rien n’est fait, les réserves de l’Agirc seront épuisées dès 2017, et celles de l’Arrco en 2020.

Il y a donc urgence. François Hollande a d’ailleurs annoncé dès le printemps, la tenue "d'une concertation sur le financement des retraites". Même s’il joue la carte du dialogue social, le gouvernement socialiste dispose de marges de manœuvre particulièrement faibles. Sur quels leviers va-t-il jouer ? Parmi les trois options habituelles, - repousser l’âge et allonger la durée de cotisations, augmenter les cotisations, ou baisser les pensions- laquelle va-t-il privilégier ?

Revue de détail

1/ Retarder l'âge du départ à la retraite.

C’est évidemment le scénario le plus difficile à épouser pour la gauche, en tête des cortèges en 2010. Les socialistes étaient les premiers à s’insurger contre le précédent gouvernement qui a enterré la retraite à 60 ans. Choisir cette option est d’autant plus exclue que cela reviendra à reprendre l’antienne du Medef. L’organisation patronale milite depuis plusieurs années pour repousser l’âge de la retraite. Mardi 15 janvier, Laurence Parisot a d’ailleurs remis le sujet sur le tapis : «Tous nos voisins ont choisi, à l'horizon 2035 ou 2040, de reculer l'âge légal de départ à 66 ou 67 ans, a-t-elle expliqué. Nous devons lancer le débat sur des orientations claires à moyen terme et la question de l'âge légal devra être reposée".

2/ Augmenter les cotisations.

Ce serait une décision difficile à prendre dans le contexte de crise actuel. L’impact sur le pouvoir d’achat serait immédiat. Surtout, pour les entreprises et les salariés, un effort de ce type a déjà été demandé en 2012. Pour financer l’extension du dispositif carrières longues promis par François Hollande, elles ont déjà subi une hausse. C’est à ce prix que l’engagement d’un retour à 60 ans pour les salariés ayant commencé tôt leur vie professionnelle a pu être honoré.

Mardi 15 janvier, à l’occasion d’une séance de négociation sur le renflouement des retraites complémentaires, - une négociation se tient actuellement sur le sujet qui doit se terminer fin mars- la CGT a toutefois proposé de mettre en place une hausse modulée des cotisations en fonction de la part de la masse salariale dans la valeur ajoutée de l’entreprise.

3/ Baisser ou geler les pensions.

C’est ce qu’a proposé le patronat qui n’y est pas allé de mains mortes, ce mardi 15 janvier, toujours lors de la négociation autour de l’Agirc et l’Arrco. Le Medef a en effet proposé que la revalorisation soit inférieure à l’inflation jusqu’en 2017. Si elle était adoptée, ce quasi gel générait une économie de 780 millions d'euros pendant quatre ans. Sur le papier, les syndicats sont contre une mesure qui traduirait par une baisse du pouvoir d’achat des plus âgés. Mais devant l’urgence, certains (dont la CFDT) pourraient cependant l’accepter à condition toutefois que cette désindexation soit temporaire.

Là est la nouveauté. Car, ces dernières années, cette voie avait toujours été écartée. En effet, Nicolas Sarkozy avait toujours refusé de toucher au pouvoir d’achat des retraités, électorat traditionnellement ancré à droite. La gauche pourrait donc briser ce tabou. C’est ce que laisse en tout cas entendre Jérôme Cahuzac. Dans une interview aux Echos, mardi 15 janvier, le ministre du budget a estimé qu'une décision de désindexation des retraites complémentaires par les partenaires sociaux serait un "élément d'appréciation très important" pour le gouvernement.

Selon Jérôme Cahuzac, elle pourrait inspirer le régime général. Prudent, le ministre du budget a toutefois précisé que «rien n'est décidé aujourd'hui et rien ne le sera sans qu'une concertation approfondie soit menée, comme c'est du reste prévu sur ce dossier". Il n’empêche, Jérôme Cahuzac a ouvert la brèche.

Il faut dire qu’une telle décision permettrait de réaliser une économie substantielle. La Fondation IFRAP a ainsi chiffrée qu’une sous-indexation (inflation moins un point) appliquée aux retraites de base (CNAV) permettrait de regagner entre 2 et 5 milliards d’euros (selon qu’on l’applique sur 2 ou 4 ans).

Dans l’opinion, le débat sur l’égalité entre les générations ne cesse de se diffuser. En septembre dernier, la cour des comptes estimait d’ailleurs que "Malgré la persistance de situations individuelles préoccupantes, il reste que contrairement à une idée reçue, les retraités sont dans une situation globale en moyenne plus favorable que celle des actifs, notamment des plus jeunes" Voilà pourquoi, baisser les pensions pourrait s’avérer la moins mauvaise option pour les socialistes.



23/01/2013
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Ces blogs de Politique & Société pourraient vous intéresser